(I play a game ’til I’m dead.
Queens of the Stone Age – Era Vulgaris)
Il fait nuit à l’heure où je commence à écrire cet article. Ces heures vont bien à mon sujet, apparemment.
Depuis deux jours, je compulse les articles internet au sujet du Joker dans The Dark Knight de Christopher Nolan. Il y a de tout : des critiques, des débats sur des forums, des analyses psychologiques du personnage et même des essais universitaires. J’ai revu le film hier soir, après avoir résisté pendant des jours à la tentation. Bref, il est plus que temps de lui dédier un article.
Ce qui suit ne concernera pas le Joker des comics – même si j’y ferai référence une ou deux fois. Cet article sera uniquement consacré au Joker interprété par Heath Ledger.
Je pense qu’on peut analyser ce personnage indépendamment de son histoire dans l’univers des comics. Nolan a voulu donner sa propre version du Joker dans un film qui constitue lui-même une œuvre complète. Si je voulais désigner une version du Joker dans les comics qui se rapproche le plus de ce que nous montre The Dark Knight, ce serait probablement Joker de Brian Azzarello et Lee Bermejo. The Killing Joke d’Alan Moore est souvent cité aussi en raison de la violence dont le Joker y fait preuve, mais il reste pour moi différent de ce qu’on voit dans le film de Nolan. Quoiqu’il en soit, si vous n’avez lu aucune des deux œuvres, allez-y. Elles ont toutes deux le mérite d’être courtes et diablement efficaces.
J’ignore combien de fois j’ai vu The Dark Knight (un grand nombre), mais ce qui me frappe, c’est le peu que j’ai écrit sur le Joker en comparaison avec la fascination que j’ai pour ce personnage. Je crois que c’est parce que le Joker constitue un vrai mystère : on ne sait rien de lui.
En creusant, on peut trouver quelques éléments.
Pour comprendre comment a été construit le Joker dans The Dark Knight, je suis d’abord allée à la source : Christopher Nolan lui-même. Les trois influences artistiques qu’il revendique pour le personnage sont Alex dans Orange Mécanique, la peinture de Francis Bacon et le mouvement punk. L’allusion à Alex semble assez évidente : il suffit de comparer son regard avec celui du Joker pour avoir un début de piste.
Les deux personnages ont leurs points communs : la violence, l’anarchie (et l’absence de morale ? peut-être pas selon leurs critères). La référence au punk coule de source aussi, mais celle à Francis Bacon est moins évidente au premier abord. Pourtant, en regardant les toiles de l’artiste, j’ai compris ce que Nolan avait pu y prendre pour le donner au Joker – même dans son maquillage. Quelque chose de douloureux, de torturé et surtout d’infiniment sombre. On dirait que ces toiles hurlent.
Christopher Nolan a dit du Joker qu’il voulait qu’il incarne un absolu : c’est un individu complet. « On le voit transformer le monde, plutôt que lui-même », dit-il dans une interview. Dans ce même entretien, le réalisateur explique que le Joker est « pure evil through pure anarchy », et qu’il ne voulait pas l’humaniser. « On ne voulait pas montrer ses origines, montrer ce qui l’a rendu capable de faire ce qu’il fait, parce qu’il en serait devenu moins menaçant. »
Et c’est là que Nolan marque un point : ce qui rend le Joker si passionnant et si effrayant, c’est qu’on ne sait absolument pas pourquoi il est le Joker. On ne connaît pas son vrai nom, on ne sait pas d’où il vient et nous n’avons pas le moindre indice sur son passé.
Au cours du film, le Joker raconte deux histoires différentes sur la façon dont il a eu ses cicatrices. (D’abord au gangster Gambol, ensuite à Rachel Dawes.) Dans la première, c’est son père qui les lui a infligées, et dans la seconde, lui-même. Les deux histoires sont totalement différentes, et totalement fausses. Certains spectateurs penchent pour une version ou l’autre en la tenant pour authentique, mais je suis prête à parier qu’elles ne valent rien. Du reste, le Joker a failli raconter une troisième version à Batman lors de leur combat final avant que ce dernier ne l’interrompe. Et comme le dit Nolan, si on connaît les origines du Joker, il devient moins effrayant…
(J’en profite donc pour dire aux analystes qui écrivent que « c’est de la faute du père si le Joker est comme ça » : non. Aucune preuve n’est donnée dans tout le film. Même la réplique « You know, you remind me of my father. I hated my father. » que le Joker lance à un homme pendant la réception où il rencontre Batman ne vaut rien, à mon avis. C’est encore un trait d’humour sarcastique. Même dans la « version officielle » des origines du Joker écrite par Alan Moore dans les comics – et je l’appelle comme ça parce que c’est celle à laquelle on fait le plus référence – il n’y a pas l’ombre d’un papa.)
Ce qui nous ramène à la question n°1 : pourquoi le Joker est-il ce qu’il est ? Quelle est sa motivation ? Le seul indice nous est donné par Alfred, le majordome de Bruce Wayne/Batman : « Some men just want to watch the world burn ». Soit. SOIT. Certains s’en contenteront, d’autres non. Je fais partie de la seconde catégorie. La déclaration du Joker « I’m an agent of chaos » peut venir compléter celle d’Alfred.
Ceci dit, si on réfléchit à la première phrase… Elle peut s’avérer moins agaçante que prévu. Je ne sais plus où, quelqu’un a comparé le Joker à Loki. Pas à celui des films, à celui de la mythologie nordique – même si celui des films Marvel lui reste assez fidèle. La comparaison est juste : Loki est par excellence le dieu de la ruse, de la plaisanterie et, d’une certaine manière, un agent du chaos. (Pour plus d’information sur le God of Mischief, je vous renvoie à l’article que je lui avais consacré.) Loki a beau venir en aide – quand ça l’arrange – aux autres dieux lors d’aventures, il est aussi l’auteur de plaisanteries qui tournent mal, de meurtres parfaitement assumés et, à terme, c’est lui qui conduit l’armée des ombres lors de la fin du monde.
Loki et le Joker mentent. Ils ont sans arrêt recours à la ruse pour arriver à leurs fins. Dans The Dark Knight, le Joker ment à tous les personnages du film (il les manipule, pour employer un autre mot) sauf à Batman pendant la scène de l’interrogatoire. C’est sans doute la scène du film où il est le plus honnête. Après tout, il parle à son égal – j’y reviendrai.
Comparer le Joker à Loki, qui a été suranalysé, sur qui on sait énormément de choses, peut aider à y voir plus clair dans la personnalité du clown de Gotham. « Some men aren’t looking for anything logical, like money. They can’t be bought, bullied, reasoned, or negotiated with. Some men just want to watch the world burn. » D’accord, Alfred. On se contentera de ça.
Question n°2 : le Joker est-il fou ? La réponse pourrait couler de source, mais internet regorge d’articles et de débats assez passionnés sur le sujet. Un blogueur est même allé jusqu’à intituler son article Heath Ledger’s Joker is the Sanest Man in Gotham. Que le Joker soit lucide sur l’état du monde, que ses déclarations soient empreintes d’un accent de vérité indéniable, c’est un fait. Mais qu’il soit l’homme le plus sain d’esprit du film, j’en doute.
Une autre analyse publiée sur un forum explique que le Joker voudrait que les gens le pensent fou alors qu’il ne l’est pas. Ses costumes, son maquillage, son rire : tout constituerait un personnage créé de toutes pièces. Il ne rit que quand il se donne en spectacle, il est sobre le reste du temps, poursuit l’analyse et, preuve irréfutable que le Joker est sain d’esprit : il contrôle absolument toutes ses actions. C’est même le seul personnage de tout le film à contrôler ce qui se passe alors qu’aucun autre personnage – Batman, le commissaire Gordon, Harvey Dent – ne maîtrise quoi que ce soit.
C’est vrai, le Joker a toujours un coup d’avance. Il construit des plans extrêmement élaborés. (Tout le plan qui conduit à la destruction de Rachel Dawes et Harvey Dent, et permet au Joker de s’évader de prison, relève du pur génie.) Cependant, je suis en désaccord avec ces analyses : à aucun moment du film le Joker ne cherche délibérément à faire croire qu’il est fou. C’est même plutôt l’inverse : quand un des membres de la pègre (Gambol, toujours), l’accuse d’être fou, le Joker réplique : « No, I’m not. No, I’m not. » Sa discussion avec Batman lors de la scène de l’interrogatoire est éclairante : il démontre au justicier qu’il est son équivalent. (Ah, il y aurait tout un article à faire sur les antagonistes comme reflets des héros.) « See, I’m not a monster. I’m just ahead of the curve. »
Oui, le Joker dénonce l’hypocrisie des autres personnages tout au long du film, il est d’une lucidité effarante sur la situation et sur lui-même. Mais est-il sain d’esprit ? A cela, je réponds : avoir recours au meurtre de masse pour démontrer un point de vue, aussi véridique soit-il, ne rentre pas dans cette catégorie. Pour moi, le Joker est fou.
Un autre trait caractéristique du Joker dans The Dark Knight – et qui se retrouve aussi dans les comics, pour le coup – est son absence totale de peur. Il ne craint rien, pas même sa propre mort, ce qui le rend insensible à toutes les menaces qu’il peut recevoir. Comme il le rappelle à Batman qui le passe à tabac dans la fameuse scène de l’interrogatoire : « You have nothing, nothing to threaten me with! Nothing to do with all your strength! ». Il ne craint pas sa mort, ce qui me fait poser cette question : le Joker est-il suicidaire ou non ?
Ici, l’interprétation relève de chacun. Le désir de mort du Joker m’a semblé évident en sortant de la projection de The Dark Knight en 2008, et l’a toujours été depuis. Les avis divergent à ce sujet.
Dans le film, il y a trois scènes où le Joker cherche à provoquer sa propre mort. Disons, pour ne pas mettre le feu aux poudres, qu’il tente le diable. Rien de tel que des petits gifs pour les rappeler :
Vous vous rappelez ? Bon. Sur le forum dont j’ai déjà parlé, les gens interprètent ces scènes ainsi : si Batman tue le Joker, il brisera sa règle fondamentale, qui est de ne jamais tuer. Si le justicier tue le Joker, ce dernier triomphe, parce qu’il aura réussi à corrompre Batman. (D’où son rire quand Batman le pousse de l’immeuble avant de le rattraper.) Même chose pour Harvey Dent, le « chevalier blanc » de Gotham devenu Double-Face.
C’est une interprétation qui se vaut.
Cependant, j’ai toujours penché pour l’autre option : le Joker a un ardent désir de mort. Je pense qu’il n’a pas peur de mourir parce qu’il le désire. Il désire voir le monde réduit en cendres, mais s’il a l’occasion de se faire tuer en bonne et due forme, je pense qu’il acceptera gracieusement son sort. C’est une interprétation romantique du personnage – au sens littéraire du terme –, certes. Elle est partagée par au moins deux critiques, à ma connaissance. Je vais donc exhumer des références que je ne cite jamais ici, mais qui sont bien pratiques.
A la sortie de The Dark Knight, la comparaison entre le Joker campé par Heath Ledger et celui joué par Jack Nicholson en 1989 dans le Batman de Tim Burton était inévitable. En fouillant dans mes archives, j’ai retrouvé un hors-série des Inrocks sur Burton où on pouvait lire ceci :
« Le souci du Joker de Nolan est plus profond, plus métaphysique, moins dandy. Ce qu’il veut, c’est en finir avec la possibilité du bien. Ce qu’il veut défaire, c’est l’héroïsme de Batman, l’idéalisme du procureur incorruptible Harvey Dent. Moins pour en tirer un profit personnel que pour remodeler le monde selon l’idée qu’il s’en fait : un charnier où tout est voué à pourrir. D’une vision démiurgique à l’autre, le Joker s’est défait de sa bouffonnerie pop pour devenir une figure tragique, dangereusement romantique même. »
Que nous dit Télérama à la même époque (référence inédite, je vous l’ai dit) ?
« Contrairement à celui de Jack Nicholson (dans le Batman de Tim Burton), le Joker de Heath Ledger est un desperado, un mélancolique. Son masque de peinture semble avoir été ruiné par les larmes, il dégage une énergie diabolique, juvénile, qui paraît l’indisposer lui-même. Alors, tout le monde veut voir ça, et il y a de quoi : ce Joker à l’infini désir de mort, indestructible malgré ses chutes du haut des gratte-ciel… »
Bon, d’accord, le mot suicidaire n’apparaît pas dans les deux paragraphes suscités. Les idées de romantisme et de mélancolie (de désespoir, me permettrais-je d’ajouter) sont en revanche bien présentes. L’aspiration à la mort est courante chez les héros romantiques. L’idée que le Joker de Nolan pouvait faire partie de cette catégorie de personnages ne m’est venue que bien après la séance de 2008. Il partage avec eux un certain nombre de critères : la jeunesse, le génie, les ténèbres et ce côté « absolu » dont parlait Christopher Nolan. Le Joker désire-t-il mourir ? Je crois que oui. Chacun se fera l’avis qu’il voudra.
Le Joker n’aura jamais fini de faire parler, et des gens analyseront toujours le film de Nolan parce qu’il a eu l’idée de génie d’en dévoiler juste assez pour nous faire réfléchir. Sur un blog, j’ai lu que le Joker fascinait parce qu’il représentait une forme de liberté à laquelle nous aspirions tous sans l’avouer. Le Joker incarne en effet la liberté absolue : il fait tout ce qu’il veut quand il le veut, il n’a aucune limite puisqu’il n’a peur de rien, et il ne culpabilise jamais.
Qu’on ne sache rien de lui le rend fascinant. En ce qui me concerne, je n’ai besoin d’aucune excuse pour apprécier ce personnage, que j’ai déjà défendu par le passé.
(Je parle d’excuse, je m’explique. Dans le vaste univers de la fanfiction, il est, disons… de tradition d’inventer un passé au Joker de Nolan. Sinon, comment l’héroïne pourrait-elle « moralement » tomber amoureuse de lui ? Manifestement, rares sont les auteurs qui se contentent du Joker tel qu’il est, ou de la quasi-absence d’explications données par Nolan dans son film. Il y a des années, j’ai écrit ma propre histoire sur le sujet, à titre d’expérience et parce que je voulais savoir s’il était possible d’inventer une telle trame tout en restant fidèle au personnage. L’héroïne ne cherchait jamais à savoir qui le Joker pouvait avoir été. L’histoire se terminait sur sa mort consentie, orchestrée par le Joker. L’amour constituait une entrave pour lui, et le Joker lui-même signifiait pour l’héroïne un aller simple pour la folie. J’ai relu récemment cette histoire et j’ai été troublée par son pessimisme. Et par la quantité d’hémoglobine contenue dans un certain chapitre. Et par deux-trois phrases trop alambiquées.)
Il est temps de clore cet article. A dire vrai, je voulais écrire un article de fond sur le Joker de Nolan depuis un sacré bout de temps. S’il vous donne envie de revoir le film : mission accomplie.
Mon dieu, mon dieu, mon dieu que j’aime cet article… Je suis totalement fan des Batman de Nolan, les meilleurs pour moi (comment ça, pas objective ??). Le Joker est sans conteste l’un des plus marquants, des plus intrigants et des mieux réussis. Ton article retranscrit bien tout ces détails, et toute la complexité de ce personnage !
Du coup, ça me donne bien envie de me refaire un marathon Batman ^^ !!
Merci, c’est un article qui représente beaucoup et tu n’imagines pas à quel point ce commentaire me fait plaisir. 🙂
J’ai une grande affection pour « Batman Returns » de Tim Burton (parce qu’il montre la meilleure Catwoman à mon avis), mais « The Dark Knight » est un de mes films préférés tous genres confondus. Je me suis toujours posé beaucoup de questions sur le Joker, et avoir passé les dernières 48 heures – peut être plus, qui sait – à faire des recherches, à réfléchir et à écrire sur lui m’a donné plus d’éléments que prévu.
Je suppose que le moment était venu. *voix d’outre-tombe* En tout cas, Nolan est un sacré réalisateur, et ça me fait penser que je devrais avoir une édition d' »Orange Mécanique » sur mon étagère au lieu de me contenter d’un souvenir de lecture…
Merci pour cet excellent article qui fait du bien, enfin un avis, que dis-je, une analyse! fine et détaillée sur un personnage qui ne laisse personne indifférent, c’est le moins qu’on puisse dire. Et comme les excellents écrits appelle les questions les plus pointilleuses, voilà la mienne: mes différents professeurs de philosophie m’ont appris à prendre en horreur le terme de « folie », car il est infiniment trop flou et trop facile à employer. On catégorise les gens entre fous et sains, alors que la réalité est souvent (toujours?) plus complexe. J’aimerais savoir quelle définition tu donnes au terme. Le Joker n’est pas fou au sens de perdu, d’idiot ou d’autiste, puisqu’il est lucide sur les aspects les plus noirs de l’être humain et qu’il est capable de brillamment prévoir les réactions humaines. Ce qui est par contre dérangeant chez lui, c’est le fait qu’il soit aveugle à tout le reste, à la lumière, au bien, qu’il ne le comprenne pas et souhaite par conséquent le détruire. De même que tous les autres êtres humains, il a pour instinct de détruire ce qu’il ne connait pas, ce qu’il ne comprend pas. Le fait qu’il ne surmonte pas cet instinct et que surtout il veuille détruire le concept même de bien qu’il ne comprend pas en fait un être dangereux inadapté à la vie en société. C’est cette inadaptabilité (oh le vilain mot) à la vie en société qui en fait un « fou », pas autre chose. D’où l’intérêt de voir échouer son plan avec les deux bateaux, n’ayant pas pu prévoir que le bien pouvait l’emporter dans un combat pour la vie. Enfin je pinaille vraiment pour pinailler, mais c’est le genre de choses qu’on a envie de faire face à un si bon article! Merci beaucoup!
La fameuse scène des bateaux est souvent le point de départ de discussions. J’ai toujours pensé qu’un des bateaux – voire les deux – aurait explosé si une telle chose s’était produite dans la réalité.
Je ne suis pas certaine que le Joker ne comprenne pas le Bien. A mon avis, le Bien est une illusion pour lui, quelque chose qui n’est pas crédible : le Bien absolu n’existe pas dans la mesure où chacun, selon lui, peut être corrompu. (Ce qu’il veut prouver avec Harvey Dent.) Le Bien est pour lui une chose fragile, une façade qui ne sert qu’à masquer la vraie nature humaine et ses instincts. Je m’arrête ici sur ce point parce que je crains de tomber dans un amas de clichés.
Ce qui rend le Joker fou, pour moi, c’est son désir de mort et de destruction poussé à l’extrême. C’est un argument très simple, mais le fait de tuer (et d’être l’auteur de meurtres de masse pour prouver un argument philosophique) n’est pas le signe qu’on est sain d’esprit. On peut être inadapté à la vie en société sans passer pour fou, je crois – tous les sociopathes ne commettent pas des meurtres.
Merci beaucoup pour ce long et intéressant commentaire que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ! 🙂
Je n’ai pas eu le temps de mettre un commentaire sur ton article car je l’ai lu avant d’aller en cours ce matin mais j’ai adoré ! Comment te dire que le Joker est un des personnages qui me passionne, qui m’inspire et qui est tellement complexe que ça prendrait peut-être des années même toute une vie pour tout analyser chez lui. Du peu que tu en dis j’ai envie de me remettre aux trois films pour découvrir de nouvelles choses. J’ai pensé à toi pendant mon cours de littérature aujourd’hui, et surtout au Joker qu’on pourrait associer à la figure de Dyonisos et du Diable qui, tous deux, veulent bouleverser l’ordre établi.
Je suis flattée, c’est adorable. 🙂 Je suis d’accord avec toi sur la comparaison avec ces deux grandes figures. J’ai vu que tu avais un blog, je vais le suivre avec attention !
Hello !
Super article, même si j’arrive un peu tard, c’était très intéressant.
Cependant, je rejoins Petite Galadrielle, le terme « fou » est très vague.
Parce que concrètement, est-ce qu’on peut dire que le Joker est atteint de psychose ? Difficile. Sa vision du monde n’est pas altérée. Très lucide, il comprend également la psychologie de ses victimes, visiblement pas d’hallucinations…
C’est juste qu’il n’a pas assimilé les interdits. Oh, il sait quelles choses sont interdites par la loi, quelles choses sont considérés comme immorales. Mais il s’en fout. Putain, qu’il s’en fout totalement parce qu’il n’a aucuns remords, et ne ressent aucune culpabilité. En fait, je pense aussi qu’il veut faire comprendre que le bien n’est qu’une illusion, mais aussi transgresser les lois, tout foutre en l’air et créer l’anarchie, n’est-ce pas une forme de pouvoir ? Nolan nous montre un monstre comme Joker. Mais finalement est-ce que c’est pas lui le plus humain ? Je pense qu’il est très frustré au fond, et que cette frustration se manifeste par un désir de destruction. C’est très controversé quand même en fait…parce que il veut prouver que le bien n’est qu’illusion et donc détruit sème le chaos, mais en même temps il détruit aussi parce que certain l’empêche d’arriver à son but de montrer que le bien n’est qu’illusion. D’un certain côté ça l’amuse, d’un autre ça le frustre. C’est pas super clair ce que je viens d’écrire mais pas grave. XD
Selon Freud, on a de nombreuses pulsions dans notre Ça.
Dont, la pulsion de mort. Se tuer. Le suicide. Qui est intimement lié à la pulsion de meurtres. Tuer. En fait, tuer de nombreuses personnes seraient une manifestation de la pulsion de mort dans son monde extérieur.
Le Joker de Nolan est un peu perdu entre les trois. Il veut mener à bien sa démonstration « le bien n’existe pas » ce qui suit sa logique de « autant tout faire péter et détruire » qui est à la fois une manifestation de « je veux crever ».
C’est logique en fait ! Il extériorise l’anarchie qui règne dans son Moi. Parce qu’il a ce…conflit intra-psychique. Ça, c’est pas tout à fait sain. On l’a tous ancré en nous, mais c’est pas non plus très sain de l’avoir si prononcé.
Ce qui est pas du tout sain, c’est que ça l’amuse. Ça le fait kiffer de voir le monde brûler. Parce que c’est une façon aussi de dire « tiens Batman ! Sale petit c*n, tu vois ? Tu vois ce que je fais à ta ville du bien ? Alors tu vas sauver cette m*rde ? » Il a quelque chose à prouver et ça lui fait du bien de le prouver en écrasant du talon quelques cadavres. Le Joker a une personnalité malade, parce que je suis sûre qu’il ne peut pas éprouver de plaisir érotique. Il a une libido aussi froide qu’un congélateur à bière. En plus, avoir un acte sexuel, c’est créer la vie. Lui, le plaisir dont il a besoin c’est la destruction. Je sais pas comment expliquer, mais son plaisir, son kiff, c’est de voir souffrir. En soi, c’est pas de voir des gens crever comme ça, c’est de se dire, putain je l’ai bien amoché, haha, il me regarde avec des yeux de chiots triste, il attends quelque chose de moi. C’est de voir sa victime implorer. Je pense aussi qu’il y a une grosse part de ça. Surtout les moments où il prend le couteau « You know how I got these scars ? ».
Le fait aussi qu’il n’a aucune empathie est quelque chose qui peut nous permettre de lui accrocher la pancarte « fou » autour du cou. On est sencé avoir assimilé ça dès le plus jeune âge. Enregistré le truc dans notre Surmoi. Quand il n’est pas enregistré, c’est qu’il y a un problème. Le scanner a un problème. Erreur 404. C’est le blème avec le cerveau du Joker. Aussi, généralement l’insensiblité cette stérilité est associé avec la personnalité Narcissique. Attention, Narcissique ne veut pas dire forcément que la personne se jette des fleurs en permanence. C’est aussi un égocentrisme pur et le besoin d’atteindre son Moi Idéal. C’est subconscient attention. Et donc ça rejoind mon deuxième paragraphe !
Je pense aussi que le Joker fascine parce qu’il est également tout le contraire du bon civil moral. On est toujours attiré par les contraire parce qu’on se fuit soi-même, on a besoin de quelque chose de nouveau, de pas banal, un truc palpitant qui nous ressemble pas. En plus du fantasme de liberté bien entendu ! ^^
Bon, je suis désolée, c’est hyper décousu, plein de fautes, mais je voulais aussi partager mon point de vue un peu chaotique et mélangé xD (mon esprit est extrêmement structuré Ahem)
Cet article est génial, merci beaucoup, j’ai appris plein de choses sur le Joker de Nolan, notamment pour le peintre expressionniste, ou encore les thèses d’autres auteurs à propos de notre criminel anarchiste préféré, bravo ! Bonne continuation !! 🙂
J’ai honte de relire cet article mille ans après l’avoir écrit et de voir que je n’ai pas répondu à ce commentaire, qui m’avait fait très plaisir à l’époque ! Si tu passes par là, merci infiniment.
J’aime beaucoup ton analyse (même si je ne la partage pas entièrement), ça fait du bien de voir que ce personnage fascine et fait autant cogiter ! Merci d’avoir pris le temps de me répondre aussi longuement. 🙂
Cracotte-dorée, je suis tellement content que tu ai parlé du ça, du moi et du surmoi. Il y a un article qui explique de matière plutôt claire le syndrome du « garçon d’à côté », qui naît du peu d’existence du surmoi, et du fait que le moi se plie totalement aux exigences du ça. Cela forme un être qui n’est pas « fou » dans le sens psychotique, et qui est complètement conscient de ses actes sans éprouver de remords. Evidemment, le Joker ne correspond pas exactement au syndrome, juste peut-être à une partie, sinon il serait bien trop facile de comprendre ce personnage qui nous fascine tant.
J’ai été agréablement surpris de trouver un article aussi bien écrit après une simple recherche Google, merci beaucoup!
Décidément, les commentaires de cet article sont des plus instructifs, je suis chanceuse ! Merci de m’avoir lue et pour le compliment, en tout cas. 🙂
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