Pour une fois, je vais écrire sur un sujet dont je sais encore peu de choses. D’ordinaire, quand j’écris sur les auteurs ou les musiciens que j’aime, je connais déjà leur biographie par cœur, je peux citer au moins trois de leurs travaux fondamentaux et le nombre d’années qu’ils ont passées à l’école.
J’exagère, mais c’est l’idée.
Ce ne sera pas le cas avec l’artiste dont je vais parler aujourd’hui. Trent Reznor a une œuvre très importante, mais à ce jour, je connais seulement deux EP et cinq albums du monsieur. C’est peu, je le concède, mais assez pour décréter, avec un émerveillement encore étonné :
CHOC ESTHÉTIQUE.
Je suis indécrottable, mais chaque fois que je vis un choc de ce genre, je me dis toujours que j’ai atteint une strate et que rien ne pourra m’émerveiller davantage. Je ferai d’autres belles découvertes, bien sûr, mais rien qui atteigne le niveau d’un Guy de Gisborne ou d’un Black Rebel Motorcycle Club. (Pour n’en citer que quelques uns.)
Bon, je ne sais plus du tout pourquoi je me suis mise à écouter Nine Inch Nails. Je me souviens qu’au lycée, plusieurs élèves avaient inscrit les initiales du groupe au blanco sur leur sac à dos. J’ai eu ma (petite) période metal, mais je ne me suis jamais penchée sur le cas du groupe de Trent. Pardon, de Mr Reznor.
Ah oui ! Je me souviens. J’avais lu une critique d’un concert de NIN sur Visual Music, qui mentionnait notamment la chanson The Warning en ces termes : « The Warning sera un orgasme pour amateur de glitch, d’électro furieuse et de déhanchés chaloupés. (…) C’est assez énorme et je peux vous assurer que plus d’une femme au premier rang y aura succombé. »
J’aime beaucoup le rock dès qu’il se fait sombre et sensuel : ni une ni deux, je suis allée chercher ladite chanson sur Youtube. Qui tient en fait plus de l’electro que du rock, mais passons. Et voilà, j’étais officiellement fichue. C’est aussi simple que ça. Je suis allée écouter l’album Year Zero dans la foulée, que j’ai aimé du début à la fin. Plus encore, Year Zero contenait tout ce que je recherchais dans la musique en cet instant T, et que je ne trouvais nulle part ailleurs : les idées, la sensualité, la beauté et la simplicité.
Je sais déjà que cette phrase soulève un paradoxe : si la musique de Trent Reznor paraît simple au premier abord, elle est en fait extrêmement travaillée. Ce qui paraît dépouillé, habillé de quelques notes de piano et d’une boîte à rythmes, est en fait le fruit d’une véritable recherche sonore.
Il suffit d’écouter la BO de The Social Network, signée par Reznor en collaboration avec son ami Atticus Ross, pour s’en rendre compte. (BON SANG MAIS QUELLE BO.)
Et puis j’aime bien : même au cœur d’albums sombres…
(Attention : Carbon Prevails de The Social Network est en train de passer dans mes écouteurs et j’ai dû m’arrêter pendant une minute pour écouter ce piano. Ce piano. Parce que oui, Trent Reznor est pianiste de formation.)
Donc, disais-je, même au cœur d’albums sombres, Reznor est capable d’écrire des morceaux lumineux, beaux, capables de vous réconcilier avec l’humanité. In This Twilight, par exemple.
A Lyon, il y a un pont sobrement nommé le Pont de l’Université. J’aime le traverser à toute heure, particulièrement quand le soleil est sur le point de se coucher : la vue est incroyable. Avant-hier, le morceau In This Twilight passait sur mon samsung à ce moment-là. C’était Beau. Avec une lettre majuscule parce que l’adjectif doit être pris dans son sens premier.
Le lendemain, ma sœur m’a fait découvrir un remix de ce morceau. C’est magnifique, et si vous êtes déprimés, c’est à écouter maintenant tout de suite :
Quoiqu’on en dise, la musique de Reznor ne pousse pas dans les profondeurs de la dépression. Même si on écoute The Downward Spiral, qui retrace la descente aux enfers d’un homme, ce n’est pas une raison pour y plonger. C’en est plutôt une pour se sentir moins seul. A ma grande frustration, je n’arrive plus à retrouver l’interview où le sieur Reznor explique que sa musique n’a jamais été faite pour inciter quiconque au suicide, mais pour dire qu’il avait lui aussi connu des périodes extrêmement sombres.
A la différence des chansons d’un Jack White – qui disent à l’auditeur de se bouger, d’agir là, maintenant, tout de suite –, celles de Reznor sont plutôt un appui quand tout va mal. Et Dieu sait que le bonhomme s’y connaît en la matière.
Un certain nombre des fans de la première heure de Reznor, d’ailleurs, auraient préféré que le musicien reste malheureux toute sa vie et continue à faire ce qu’ils considèrent comme une meilleure musique que celle que le bonhomme produit depuis son mariage.
En 2009, Trent Reznor a en effet épousé (la déesse) Mariqueen Maandig, avant de lui faire deux enfants et de remporter un Oscar pour la BO de The Social Network. Depuis, il a composé les BO des deux films suivants de David Fincher, sorti deux EP et un album avec le groupe fondé avec sa femme, How To Destroy Angels, ainsi qu’un nouvel album de NIN. Il est heureux, tout va pour le mieux et Trent avoue ne pas du tout avoir envie de revenir à l’état psychologique où il se trouvait 20 ans plus tôt. Compréhensible.
C’est peut-être parce que je viens juste de débarquer en tant qu’adepte de Reznor, mais j’aime beaucoup son travail récent. (Non, je ne regrette pas d’avoir manqué la période où il avait les cheveux longs et faisait tourner les têtes – pour plus de détails, je vous laisse regarder le clip de Closer. En 2014, il a toujours une voix sensuelle en diable et ça me va très bien.) How To Destroy Angels est un excellent projet à mon sens, la chanteuse est parfaite et, comme toujours, ça fourmille d’idées.
Effet direct de la musique du monsieur : c’est très, très inspirant. J’ai 36000 idées en écoutant ses albums et je n’ai qu’une envie, me remettre à bricoler des morceaux – bientôt, espérons. J’ai déjà évoqué mon groupe, The Venetian Sisterhood, sur ce blog, mais ça me donne une occasion de vous donner l’adresse de son bandcamp : http://thevenetiansisterhood.bandcamp.com/
Je sens qu’il faut conclure. Jetez-vous sur le premier EP de How To Destroy Angels et la BO de The Social Network. Quoiqu’on en dise, le dernier album de Nine Inch Nails, Hesitation Marks, reste une bonne façon de découvrir le groupe en douceur. Si vous n’avez pas froid aux yeux, passez direct à Year Zero (qui est devenu un de mes albums préférés, pas moyen). Et à toute la suite.
J’ai bien envie de revoir le Millenium de David Fincher ces temps-ci, et je sais que c’est la faute de Reznor. En tout cas, l’homme vient de rentrer dans le panthéon de mes héros. Il est la preuve vivante qu’on peut toujours s’en sortir et, bon sang, je commence à peine mon bout de chemin avec lui.
(Ci-dessous, une vidéo qui le montre enregistrer avec Dave Grohl et Josh Homme. De rien.)
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